Un maire pour la commune de Plaisance
7 février 1790

Le 7 février 1790 les habitants de Plaisance sont appelés à nommer leur maire et leurs officiers municipaux. M.M. les Notables :
- Sylvain Bonneau, Curé
- Demarquet de Céré, Chevalier
- Sieur Vacher de la Pouge
- Sieur Joyeux
- Normand
- Vauzelle
- Laurendeau
- Mirel
Ils furent loin d’être satisfaits de la nomination du maire si l’on en croit la lettre qu’ils adressèrent à l’Assemblée Nationale de Paris, et ils manœuvrèrent pour faire annuler cette nomination.
Les notables de la ville et communauté de Plaisance, disant qu’il aurait été fait une convocation de ladite communauté, à jour fixé pour le dimanche trente janvier. L’appel fait des individus que nous avons crus capables d’élire, le nombre ne s’y est point trouvé, que cependant on a procédé à la formation de la nouvelle municipalité, ordonnée par vous, nos seigneurs et approuvée par Sa Majesté.
Après le choix fait, au scrutin, du président de l’Assemblée, de suite, on a procédé à l’élection du maire, lequel ne s’étant par trouvé légal, Monsieur le Président a demandé que l’assemblée fut remise au dimanche suivant sept du présent, ce qui a été arrêté.
Ledit jour, nous avons donc procédé à l’élection du maire. La pluralité des voix s’étant tournée en faveur d’un particulier nommé Audoux, cabaretier, marchand d’étoffe de sa fabrique, de sel, de tabac, de poudre et de plomb, qui va en outre d’un hameau à l’autre, d’une maison dans l’autre, mettre en œuvre les laines de ses particuliers, qui peut être lui doivent encore les journées qu’il y a employées, en outre est parent et allié aux trois quarts des habitants de ladite ville, qui sont également marchands, cabaretiers et boulangers, qui ne sait à peine lire et écrire, enfin incapable d’être à la tête d’une paroisse, n’ayant aucune lumière ni connaissance que celle de l’ambition qu’il a manifestée jusqu’au point de mener chez lui une majeure partie du peuple pour les engager à lui accorder leurs suffrages, et qui, depuis la publication des Lettres Patentes de Sa Majesté pour la formation de ces nouvelles municipalités, ont toujours bu et mangé chez lui, fête et dimanche, et y étant encore en ce moment.
Ce considéré, nos seigneurs, il vous plaise d’examiner que celui qui doit observer les lois et les doit faire mettre à exécution a souvent le plus grand intérêt à les violer. Possédant toutes les qualités ci-dessus expliquées de nous donner avis incontinent de la marche que nous devons observer sur l’exposé ci-dessus, et d’autre part afin que nous ayons à nous y conformer, c’est la grâce que nous avons l’honneur de vous demander.
Nous ne savons pas si les notables reçurent les instructions qu’ils demandaient ? C’est possible, car il sera fait allusion, au cours de la réunion suivante, aux Lettres Patentes du mois de février dernier.
En tout cas, ils provoquèrent une nouvelle réunion pour nommer une autre municipalité, plus conforme à leurs aspirations.
28 février 1790
Le 28 février 1790, on va donc recommencer l’élection. Les notables vont s’entourer de toutes les précautions et garanties possibles pour assurer, en leur faveur, une élection qui ne puisse, en aucun cas, être contestée.
Tous les habitants de la ville et paroisse de Notre-Dame de Plaisance en Poitou, assemblés en l’église de cette paroisse, seul lieu convenable à l’assemblée qui nous occupe, en exécution des lettres patentes du Roi sur le décret de l’Assemblée Nationale pour la constitution des municipalités, données à Paris au mois de décembre 1789 et au mois de janvier dernier, qui ont été publiées, tant au prône que par affiches à la porte de l’église de ladite ville et paroisse de Notre-Dame de Plaisance aux fins de procéder :
D’abord à la nomination d’un président, d’un secrétaire et de trois scrutateurs1.
1. qui constituaient ce que nous appellerions, aujourd’hui, le Bureau de vote.
Tout semble avoir été minutieusement préparé d’avance, y compris une sorte de discours électoral flattant les citoyens et faisant appel à tous les vieux slogans habituels avec lesquels on fait marcher les peuples ! À part quelques particularités, dues peut-être au greffier qui a recopié le texte, l’orthographe est impeccable.
Les habitants de Notre-Dame de Plaisance, désirant se conformer aux lettres patentes du mois de février dernier et afin qu’aucun d’eux ne puisse s’en écarter ont d’abord délibéré qu’il était de la prudence de rappeler ces mêmes dispositions pour en faire connaître l’esprit à tous ceux à qui elles ont prescrit l’obligation la plus étroite de s’y conformer, ce qu’ils ont tous déclaré parfaitement bien entendre et comprendre et en reconnaître toute la sagesse, qui leur fait déjà sentir cette jouissance précieuse, inséparable, de l’esprit de concorde, des vrais sentiments patriotiques, toujours faits pour assurer le bonheur du peuple, sentiments qui sont déjà exprimé par des citoyens raisonnables, juste et vraiment patriotiques, qui sentent tout le prix de la liberté dont ils sont dignes de jouir.
Ne leur restant plus qu’à consommer avec justice l’ouvrage qui leur est confié en s’occupant des différentes élections qui forment l’objet de la présente assemblée et après s’être conformé, de la manière la plus pénétrante, à tous les articles à observer pour établir leur municipalité, ce qui fait qu’on s’est d’abord fixé à la nomination d’un président.
Nous avons bien failli ne pas connaître l’auteur de ce merveilleux morceau de bravoure et ç’eût été bien dommage !
Sous le texte figurent deux signatures, celle de Bonneau et celle de Normand. Celle de Normand est rigoureusement de la même encre que celle du texte. Celle de Bonneau, vicaire et curé de la paroisse, est d’une encre beaucoup plus noire, de bien meilleure qualité. D’autre part, ce n’est pas celui qui a fait ce texte littéraire, qui l’a, lui-même, transcrit au registre. C’est un autre qui l’a recopié en laissant en blanc la place des mots qu’il ne pouvait pas lire. Or, ces mots (soulignés dans le texte) ont été rajoutés, par la suite, exactement de la même encre que celle de la signature de Bonneau.
Le texte, à n’en pas douter, fut bien l’œuvre du curé Bonneau 1. Qui d’autre, d’ailleurs, à Plaisance et à l’époque, eut été capable de composer dans ce style là ?
Suite, une élection régulière…
1. – Sylvain Bonneau, né le 21/06/1757 à Luchapt (86). Vicaire de Notre Dame de Plaisance (Vienne), au moins depuis janvier 1788 jusqu’en mars 1791. Par la suite, il sera, entres autres, vicaire à Luçon (85). Sources : https://be-archives-vendee.inmediatech.co/ark:/22574/biographie10083
1789
À Plaisance
Sources : La vie municipale de Plaisance sous la révolution de 1789, Louis Germaneau. Ed. Service écologie et biogéographie de la faculté des sciences fondamentales et appliquées de l’université de Poitiers – 1981